Jean-Marie Hoslet – Charleroi : Du Pays noir au Pays arc-en-ciel
Temps de lecture : 7 minutes

A quel moment as-tu décidé de te porter candidat ?

Je n’ai pas pris une décision soudaine. C’est le fruit d’une double réflexion.

Il y a d’abord le moment. Je viens d’accepter, à 64 ans, d’être prépensionné. J’étais depuis 1998, permanent provincial à la CSC METEA, soit la branche de la CSC qui regroupe la métallurgie et le textile et qui compte plus de 25000 affiliés. Le point culminant de ma carrière syndicale, entamée comme délégué en 1991 chez Alsthom (avec un « h » à l’époque) 7 ans avant de devenir permanent de la CSC métal de Charleroi. Je retrouve donc du temps pour un autre investissement personnel au service de la collectivité.

Il y a ensuite le parti. Les Engagés correspondent à ma vision des choses pour l’avenir de Charleroi. Ils ne défendent pas un programme contre les autres formations politiques, mais un programme qui rassemble.

Je suis candidat pour apporter ma brique à la construction du nouveau Charleroi, sans querelles politiciennes stériles. Je pense avoir le bagage suffisant pour être un acteur du redéploiement socio-économique et humain de Charleroi. Eric Goffart incarne bien cette vision constructive.

« Cette campagne est plus solidaire, plus enthousiaste »

Ce n’est pas ta première campagne. Tu as déjà été candidat en 2012 sur la liste cdH. Quelles différences perçois-tu ?

(Sourire) Houlà ! Attention à ce que je vais dire ! Cette campagne-ci fonctionne davantage en équipe ; elle est plus solidaire, plus enthousiaste, à l’image d’une troupe de jeunes préparant un camp basé sur un projet social. Nous avons besoin de telles bulles d’oxygène.

Il y a 12 ans, je voyais de vieux baroudeurs, forts de leur vécu, plus individualistes. J’ai été déçu par la suite. N’ayant pas été élu, je m’attendais à poursuivre l’aventure dans une dynamique de soutien. Ce ne fut pas le cas.

Mais ce n’est pas grave : mon premier combat avant et après 2012 restait l’engagement syndical et les années furent difficiles, avec en toile de fond le déclin de l’industrie et notamment la fermeture de Caterpillar en 2016.

Est-ce ton plus mauvais souvenir en tant que responsable syndical ?

Un des plus mauvais. Il y avait déjà eu la fermeture de Carsid, un bastion de la sidérurgie carolorégienne en mars 2012. Et comme la maison mère Duferco restait propriétaire du terrain, il n’y a eu aucune possibilité de l’utiliser à court terme pour une reconversion.

« Caterpillar : la désillusion »

Caterpillar, c’est une autre désillusion. L’entreprise avait déjà baissé la voilure pendant la crise de 2008. Minimisant sa durée, en tablant sur une reprise rapide des marchés, la direction choisit de hausser les cadences en engageant des CDD. Un échec qui a abouti à la fermeture.

Ici, les organisations syndicales ont pu négocier l’achat des terrains et des bâtiments en espérant rebondir. On connaît la suite : trois projets, aucun aboutissement. J’aurais vraiment espéré que le projet Lego puisse aboutir, pour le nombre d’emplois annoncés et pour l’outil pédagogique que représentait Lego pour nos enfants.

Des points positifs ?

La création de la Cité des Métiers dans le centre de Charleroi autour de l’Université du Travail. Même si j’aurais préféré installer un Campus technologique à Gosselies où nous aurions pu construire un magnifique bâtiment futuriste pour abriter l’UT, les Aumôniers du Travail et les universités.

La filière technologie qui a contribué à faire la grandeur de Charleroi aurait eu une meilleure visibilité nationale et internationale avec cette implantation en un seul endroit, tous secteurs d’enseignement confondus.

Nous avons besoin de faire de la Cité des métiers un atout majeur, vu que paradoxalement cette filière conserve encore une image de deuxième choix. Les parents visent l’excellence et trop d’entre eux pensent qu’elle est limitée à l’enseignement général. C’est d’abord là qu’ils inscrivent leur enfant. Et s’il échoue, il y a le technique. Et si ça ne va vraiment pas, il reste le professionnel.

On gère les échecs alors qu’on devrait sublimer l’enseignement technique.

« Un challenge positif en permanence »

200 000 passagers par an en 2004, plus de 10 millions aujourd’hui…

Et pourtant, si notre région a connu des succès incroyables dans le transport, ferroviaire, dans la construction métallique, la conquête spatiale, c’est grâce à des entreprises comme les ACEC, Thalès, Alstom etbientôt Aerospacelab,  la nouvelle usine de satellites de Benoît Deper dont la construction a commencé, tout près du site des ACEC. Où comme tant d’autres j’ai débuté en 1980 après mes études d’électromécanicien.

Un autre motif de satisfaction, c’est le développement de l’aéroport de Charleroi. Quand je suis entré au Conseil d’administration, en 2004, il y avait 200 000 passagers par an. Nous sommes à plus de 10 millions aujourd’hui. C’était un challenge positif en permanence. Tous les bénéfices que nous gagnions étaient réinjecté : un tiers pour le personnel, un tiers pour les investissements au sein de l’aéroport, un tiers pour les actionnaires. Un regret à cet égard : l’ouverture trop vite et trop importante, à mes yeux, au privé.

Tu es réputé comme « un vrai Carolo », vivant sa ville corps et âme, imprégné par ses souffrances et sa générosité. Comment la perçois-tu aujourd’hui ?

(Un temps de réflexion). Comme la chrysalide. La transformation actuelle de la ville est son cocon. Elle doit encore prendre son envol de papillon.

J’y suis né, ai grandi à la Neuville, baigné par les clameurs du Sporting et de l’Olympic, j’ai connu les places de la Ville basse et les places de la Ville haute, les rues Neuve et de la Montagne noires de monde. Mon vœu de Carolo, c’est de retrouver une ville agréable, de redonner goût à la dynamique de Charleroi, de redonner l’envie d’y venir.

« Le folklore là où le cœur de Charleroi continue de battre »

Un vœu, dis-tu : pas de crainte que ce ne soit un vœu pieux ?

Je comprends que l’on doute et que l’on n’ait pas la patience d’attendre. Tout le monde veut une belle route devant chez soi, mais râle quand il y a des travaux pour les rénover.

Avec les amis du comité du carnaval de Charleroi

Mais je suis confiant. Cela tient sans doute au fait que je vis ma ville dans sa dimension de folklore également. On peut en sourire, le qualifier de loisirs, d’une forme de détente par rapport aux engagements de responsable syndical confronté aux réalités humaines et sociales souvent douloureuses. Mais pour moi, c’est là, dans cette joyeuse fraternité que le cœur de Charleroi continue de battre. Et je suis fier de ma médaille de 25 ans au sein de la société des Gilles « Les récalcitrants » et du comité du carnaval. Fier de faire aussi partie de la Madeleine, une évidence depuis que j’habite Jumet.

Fier de ma médaille de 25 ans au sein de la société des Gilles « Les récalcitrants »

Dans ton CV, tu cites d’ailleurs le terme « folklore » entre l’apiculture et la moto dans le court chapitre « Centres d’intérêt » après l’impressionnante énumération de tes fonctions honorées pendant ta carrière.

Oui tu auras remarqué que je n’ai cité qu’un titre, celui de vice-Président de l’Œuvre Royale de la St Nicolas de Charleroi fondée en 1882, l’œuvre sociale pour les enfants défavorisés. C’est celle qui me tient le plus au cœur depuis plus de 30 ans.

Chaque année, nous récoltons de l’argent via diverses activités qui ont pour objectif d’offrir des jouets et des friandises offerts à des enfants hébergés dans diverses institutions carolos.

Les Carolos sont généreux. Le fruit de notre labeur de bénévoles s’élève jusqu’à 25 000 euros. Notre salaire, si j’ose dire, c’est le sourire de ces enfants.

Le comité de l’Œuvre de la Saint-Nicolas : notre « salaire », c’est le sourire des enfants !

« Priorité aux policiers de quartier »

Que manque-t-il encore pour que Charleroi obtienne deux ou trois étoiles au Michelin signifiant que notre ville « mérite le détour », voire « vaut le voyage ?

Qu’elle parvienne à changer son image de capitale du « Pays noir », pour devenir une « ville arc-en-ciel », pour sa diversité. Nous sommes encore associés à la réputation négative qui date des années Dutroux.

J’ai toujours été frappé par la propension des journaux extra muros de Charleroi à placer en « une » un fait-divers qui se passe dans la région Carolo, alors que les mêmes faits qui se passent ailleurs sont passés sous silence.

On ne peut nier que l’insécurité est l’une des raisons qui freine l’envie de venir à Charleroi évoquée plus haut.

C’est exact et les Engagés ne sont pas candides sur cette question Comme Eric le soulignait lors du débat électoral organisé par Le Soir, repris dans l’édition de ce samedi 5 octobre, j’insisterai sur l’importance des agents de quartier. Dans mon enfance, j’ai le souvenir d’un agent de police affable, que nous connaissions et qu’on abordait en confiance. Les soucis se réglaient à l’amiable.

« On produit aujourd’hui dix fois plus d’acier qu’avant, avec dix fois moins de personnes »

Les atouts, nous les avons : reste à mieux les valoriser. Charleroi est tout de même reconnue pour le développement des nouveaux pôles la biochimie, le numérique, l’aéronautique, sans oublier l’industrie traditionnelle comme la métallurgie avec une production haut de gamme.

C’est clair. Cela fait partie de l’amélioration de l’image de notre Ville. Je tiens juste à attirer l’attention sur la question du nombre d’emplois que cette augmentation de production implique.On produit aujourd’hui dix fois plus d’acier qu’avant, avec dix fois moins de personnes. Cela m’interpelle. Le renouveau de la ville passe aussi par cette priorité, la création d’emplois de qualité et accessibles au moins qualifiés.

Que faire ?

Une des pistes sera de miser sur des emplois stables, durables et de proximité. Les liens du vivre-ensemble, ce n’est pas seulement un slogan de nostalgie. C’est l’avenir.


CV de Jean-Marie Hoslet

Prépensionné

  • Contact : jmh-lesengages@hotmail.com

Formation

  • 1980 : CESS   Université du Travail Charleroi
  • 1997 : Gradué  sciences sociales du travail – Notre Dame de la Paix à Namur
  • 1998 : Gradué en gestion – Ministère de la Communauté Française

Profession

  • 1980 au 31 12 1997 électromécanicien aux A.C.E.C.     
  • 1982 : Service militaire : Force Navale Sous-officier d’élite               
  • 1998 : Permanent syndical METAL région de Charleroi
  • 2004 : Permanent syndical Metal de la province de Hainaut
  • 2009 : Responsable de la province de Hainaut pour le METAL et le textile
  • 2024 : Prépensionné
  • Expériences en tant qu’administrateur
    TechnoCampus                  
    BSCA  – AEROPORT DE Charleroi, Bruxelles SUD
    Wan – Centre de compétence AERONAUTIQUE
    Fonds de réinsertion de la métallurgie Hainaut Namur
    Caisse SOCIALE TRAVAILLEURS des fabrications METAL CHARLEROI)
    Caisse sociale travailleurs des fabrications Metal La Louvière
    Fonds formation industrie Hainaut NAMUR
  • Ancien Membre  :
    Comité stratégique développement de la ville de Charleroi
    Comité Technique SAMBRE invest
    Commissions paritaires Nationales
    CP 111 Fabrications métalliques
    CP 104 Sidérurgie
  • Engagements actuels :
    Magistrat  – Conseiller Social à la cour du travail de Mons depuis 2014
    Vice-président de l’œuvre de la Saint-Nicolas de Charleroi
    Membre de la société royale garde anglaise et ses écossais de Jumet

Qualités 

  • Autodidacte, optimiste, persévérante, assertive

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