Son compteur de vie affiche 49 ans. Faux. Denis Dambre en a 19. Ecoutez-le. Regardez-le. Sa voix juvénile, ses yeux pétillants déversent l’enthousiasme candide d’un amoureux qui a trop d’envie de partager sa passion.
En l’occurrence ses passions. Il en a, au moins, deux : sa région de Charleroi – et l’Histoire, la grande, avec une majuscule, qu’il sert en racontant, à sa façon, alerte et convaincante, les destinées de Carolos qui l’on faite. Ou de célébrités qui ont laissé une empreinte dans notre pays.
Chronique d’une Sambre histoire
Comment ? Par le biais d’une nouvelle chronique diffusée sur les ondes de Buzz Radio. Elle s’appelle « Chronique d’une Sambre histoire ». Denis Dambre la doit au directeur Bernard Baudaux qui lui laisse carte blanche (www.buzzradio.be)
Les sujets sont tirés de l’actualité. Ou de ses envies de faire découvrir tel personnage qui le fascine ou l’intrigue. Qu’il soit connu ou identifié par le nom d’une rue sans que, dans nombre de cas, le citoyen sache pour quelles raisons il – ou elle – a obtenu ce diplôme de notoriété.
Familier sans familiarité
Des exemples ? Sa première chronique fut consacrée à Charles II, contraint de laisser sa place, la plus prestigieuse de Charleroi à Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban. La raison ? « Pour une question de CV », dit le chroniqueur. Le terme choisi dit la tonalité de ses textes. Enjoués, un rien badins, toujours sérieux. Familiers sans familiarités. Vulgarisateurs sans vulgarités. Soucieux de précision.
Rappelons le contexte. Le pouvoir espagnol décide, en 1666, de construire une forteresse sur un éperon rocheux bordant la Sambre, occupé par un modeste village appelé Charnoy, qui sera rasé. Elle est inaugurée, sans être achevée, le 3 septembre 1666. Et porte le nom du roi d’Espagne, Charles II. Qui vient à peine d’être intronisé alors qu’il n’a que… 4 ans.
Un an et demi plus tard, le 2 mai 1668, Charleroi passe sous domination française, tout en conservant son nom. C’est Vauban, architecte et ingénieur de Louis XIV qui bâtit la forteresse. Comme tant d’autres.
Et Charles II ? Denis Dambre décrit ce que fut sa vie. Il le fait sobrement, en raconteur d’histoires singulières. Il évoque un être malheureux, souffrant d’un retard de croissance, de défaillance mentale et de crises d’épilepsie, tous ces maux découlant de mariages consanguins. Il mourut à 39 ans sans descendance.
L’aisance des planches
Il a un modèle : le très éclectique Lorànt Deutsch, acteur, animateur et écrivain français qui signe d’excellentes chroniques de ce type sur RTL.
Denis Dambre n’est pas plus historien que son maestro – il est formateur à l’Académie de police de Namur – tout en ayant un second point commun : il est également acteur au Cercle l’Equipe, de Gerpinnes, la compagnie de Michel Robert. Il a joué dans « Vauban toudis li » et « Ribotte ».
La comparaison peut bien le gêner, on lui rétorquera que les règles, les exigences et le goût de transmettre de l’émotion et susciter l’intérêt sont les mêmes, que l’on soit acteur amateur ou acteur renommé.
L’aisance des planches et des studios transpire de leurs chroniques avec les astuces d’intonations pour capter et relancer l’attention. Sans oublier le rôle pédagogique.
On apprend chaque fois quelque chose. C’est l’objectif.
Outre les sujets d’actualité, Denis Dambre puise dans le riche patrimoine de notre région pour nous faire revivre des personnalités qui l’ont marquée. Rimbaud et Magritte par exemple.
La boulangerie familiale de Gilly
Denis Dambre, domicilié à Nalinnes-Haies, est un Carolo pure souche.
« Je suis un enfant de Gilly qui a vécu dans le cadre d’une boulangerie familiale, Chaussée de Fleurus. Elle était dirigée par mon grand-père Emile Dambre, aidé par ses deux fils et ses belles-filles. J’ai grandi dans la chaude odeur du pain et des gaufres de la braderie. »
Il ajoute l’amitié des copains du Collège Pie X, l’engagement au patro de Gilly.
Cet univers rassurant s’écroule à ses 14 ans. La famille déménage à Zellik, près de Bruxelles. Il est scolarisé dans un collège situé près de la gare du Nord. Il deviendra éducateur spécialisé, choisit de partir pour la France où il en manquait. Etapes à Angoulême, dans le Nord, en Creuse. « Même si je me suis bien adapté à mon environnement bruxellois, je suis rendu compte plus tard combien Charleroi m’avait manqué dans ma jeunesse. »
Comme un aimant
Le déclic du retour en Belgique, ce fut le drame d’un décès familial (sa sœur).
« Cela a agi comme un aimant. Ma place est ici. Je suis revenu. Et j’y reste. J’ai soif de rattraper le temps perdu. »
Il n’oublie pas ses racines.
« Je mesure ce que ressentent des amis venus d’ailleurs, même de la deuxième ou de la troisième génération quand ils se réfèrent à la patrie qui a nourri la mémoire familiale. Et qui continue de vibrer en eux, avec plus ou moins d’intensité.
Je pense aussi qu’un éloignement renforce l’envie de revenir. En préparant une chronique sur Jacques Bertrand, j’ai appris, sur le site de Charleroi-Découvertes.be, qu’après avoir appris le métier de fabriquant de chaises, il avait effectué un tour de France de deux ans, comme c’était à la coutume à son époque, le dix-neuvième siècle, pour nos artisans. Et que c’est pendant son déplacement qu’il s’est rendu compte de la force de son attachement pour Charleroi. Sans me comparer à lui, bien sûr, j’ai senti cela aussi pendant mes années françaises »
Qui sait si ce n’est cette tournée qui a stimulé son inspiration pour créer l’hymne carolo ?
« Pays de Charleroi », c’est bien celui qu’il préfère.
« Surtout quand ce sont des jeunes supporters du Sporting qui l’entonnent. Quel bonheur ! »
Parole de Carolo !