Le 2 septembre 2016, l’annonce de la fermeture pure et simple du site de Caterpillar Gosselies bouleversait le paysage socio-économique de la région de Charleroi, et plus largement de la Wallonie.
Ce 2 février 2017, les travailleurs de Caterpillar et leurs collègues actifs dans les entreprises sous-traitantes se rendent au Gouvernement wallon, pour rencontrer les autorités régionales.
L’occasion de faire le point sur ce dossier crucial pour notre région.
Un séisme économique
Caterpillar Gosselies représentait encore, au jour de cette annonce, et après avoir déjà subi plusieurs restructurations au cours des années précédentes, un volume d’emploi propre de 2.200 salariés.
Aux salariés de Caterpillar s’ajoute un nombre équivalent de travailleurs des entreprises sous-traitantes.
On recense 47 entreprises wallonnes directement impactées (28 en Hainaut, 10 en province de Liège, 9 en province de Namur). Près de 2.200 emplois sont directement concernés, essentiellement dans des PME (70% des entreprises emploient moins de 50 travailleurs, 22% entre 50 et 250 personnes). A titre d’exemple, chez Yusen Logistics, un sous-traitant direct de l’entreprise, 126 emplois sur 200 sont menacés.
L’impact de la fermeture dépasse donc à la fois largement le contexte de l’entreprise Caterpillar elle-même, ou de la seule région de Charleroi.
Loi Renault : phase d’information et de consultation
La procédure dite « Loi Renault » a été mise en place par le législateur belge suite aux conditions désastreuses dans lesquelles la direction de Renault a organisé la fermeture du site de Renault Vilvorde en 1997.
Elle a pour objectif d’offrir aux travailleurs d’une entreprise soumise à une opération de licenciement collectif, des garanties élémentaires pour les aider à obtenir en priorité toute l’information qui concerne leur situation sociale et leur donner un cadre légal permettant une négociation aussi équilibrée que possible.
Proposition des cadres de Caterpillar
Durant cette phase d’information, une proposition, jugée crédible et soutenue par les syndicats de l’entreprise, a été mise sur la table par un groupe de cadres de Caterpillar Gosselies.
L’objectif était de maintenir sur le site une activité d’assemblage de chargeuses sur pneus.
Cette activité aurait permis de préserver environ 400 emplois liés au site (317 parmi les travailleurs de Caterpillar Gosselies, 80 parmi les sous-traitants).
L’hypothèse a toutefois été rejetée fin janvier 2017 par la direction de Caterpillar au motif suivant : “Le groupe valide la méthodologie et les chiffres avancés par les cadres en matière de coûts et de réduction d’espace de la solution alternative, mais celle-ci ne rencontre pas les objectifs du plan de restructuration mondiale lancée par le groupe qui vise à réduire les coûts de 1,5 milliard de dollars et la surface d’exploitation de 10%”
Cette proposition constituait la seule alternative structurée proposée depuis l’annonce de la fermeture du site.
Loi Renault : négociation des indemnités pour licenciement collectif
Comme dans de nombreuses procédures de licenciements collectifs, la phase d’information et les consultations liées à l’avenir des sites de production n’ont pu infléchir la volonté de la direction générale de l’entreprise et l’inciter à revoir sa décision.
On va donc entrer dans la seconde phase prévue par la Loi Renault, à savoir la négociation des conditions de licenciement et singulièrement des indemnités pour licenciement collectif.
Il est indispensable que, en application du droit belge et du pouvoir de négociation dont disposent les organisations représentatives des travailleurs, avec l’appui des autorités publiques, les indemnités puissent être négociées dans les conditions les plus favorables pour le personnel durement touché.
Les autorités publiques communales, régionales et fédérales doivent dépasser leur divergences politiques et faire preuve d’une indispensable union sacrée en la matière.
Cinq mois après l’annonce de la fermeture du site, la volonté politique ne peut faiblir.
Avenir du site
Outre les questions fondamentales liées aux indemnités pour licenciement collectif, il est indispensable pour le développement industriel et économique de notre territoire d’adopter une attitude de fermeté à l’égard des propriétaires du site de production de Caterpillar à Gosselies pour récupérer la maîtrise foncière des terrains concernés.
Caterpillar Gosselies représente une réserve foncière gigantesque (près de 100 ha), située dans l’une des zones de développement économique les plus dynamiques de notre région.
Dans le cadre juridique légal belge, il est indispensable de recourir à toutes les voies de droit existantes pour récupérer la maîtrise de ce site dans les plus brefs délais, et de rendre ces infrastructures disponibles à une reconversion économique efficace et indispensable pour notre région.
Je précise que cette opération de récupération de la maîtrise foncière doit être réalisée dans un cadre juridique sérieux et respectueux de l’Etat de droit, garant de la capacité générale de notre région d’accueillir des investissements.
Comme j’ai pu l’indiquer lors d’un débat à la RTBF le 4 septembre 2016 (23′), je m’oppose fermement à la vision du PTB qui vise à prendre possession des moyens de production par des voies de fait, hors de tout cadre légal.
Cette volonté d’assurer coûte que coûte le respect de l’Etat de droit ne doit pas empêcher (bien au contraire), la plus grande fermeté dans les négociations qui sont menées par les autorités publiques avec Caterpillar, et au besoin des procédures judiciaires ou d’expropriation qui devront être menées à l’encontre de l’entreprise.
Conclusion
Le temps s’écoule, les procédures peuvent paraître longues et complexes.
Les enjeux semblent dépasser les situations individuelles.
Il n’empêche.
Les autorités publiques, les organisations représentatives des travailleurs, et de près où de loin toutes les organisations qui structurent le paysage socio-économique de notre région doivent pouvoir, avec les moyens qui sont les leurs, continuer à soutenir les travailleurs de Caterpillar et de ses sous-traitants, et proposer toutes les alternatives possibles et crédibles pour la reconversion du site de Gosselies.
Je resterai attentif à ce dossier et suis à disposition, en qualité d’Echevin de la Ville de Charleroi, de celles et ceux, travailleurs ou représentants des travailleurs, qui souhaitent partager des informations et des réflexions quant aux procédures en cours et aux pistes de reconversion du site de Caterpillar.
N’hésitez pas à me contacter via ce blog.